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Molen Besace : Culture - Lecture - Nature

Le plaisir, la découverte, le respect, le développement,.. ;

L'obsolescence programmée - Robin Van Leeckwyck

( extrait du FLAMBEAUX n°3, oct.2012  - le journal de Molen Besace)

 

Le sujet abordé maintenant est un peu plus technique que ce qui a déjà pu être édité dans ce journal, il s'agit de quelque chose d'intriguant et pourtant révoltant : l'obsolescence programmée. La plupart des gens ont sans doute déjà entendu parler de cette pratique sans pour autant savoir y mettre un nom. Voici tout de même un petit rappel sur cette pratique !

Commençons par la définition : l'obsolescence programmée regroupe l'ensemble des techniques visant à réduire la durée de vie ou d'utilisation d'un produit afin d'en augmenter le taux de remplacement.

A la base, il s'agit d'une véritable doctrine qui vise à booster l'économie d'un pays en appliquant ce procédé. C'est Bernard London qui, en 1932, utilise pour la première fois cette expression "Ending the Depression Through Planned Obsolescence" dans son ouvrage "The New prosperity". A cette époque, suite à la grand crise de 1929, les Etats-Unis sont en plein New Deal. Les économistes travaillent d'arrache-pied pour relancer le pays. Car à l'époque, la population avait pris l'habitude de tout garder et de tout réutiliser. Les avantages sont doubles. D'un point de vue économique, en produisant plus, on réduit les coûts de production (gains d'échelle) et d'un point de vue technique, les ingénieurs planchent sur le sujet afin de trouver les meilleurs manières qui soient pour appliquer ce concept. Le capitalisme prend de plus en plus de place dans cette société en plein changement.

Prenons les exemples les plus courant (et par conséquent les plus marquant):

- L'ampoule électrique à incandescence : sa durée de vie a été « harmonisée » et maintenue par les industriels (cartel Phœbus) à 1 000 heures, dans le monde entier, alors que des brevets existaient sur des ampoules d'une durée de vie allant jusqu'à 100 000 heures. Mais il faut savoir que l'augmentation de la durée de vie d'une ampoule diminue son rendement et donc augmente la consommation énergétique à luminosité constante.

- L'automobile : pour concurrencer Henry Ford et sa Ford T volontairement vendue comme modèle unique, à portée du consommateur moyen, fiable, facile à réparer et très robuste, Alfred P. Sloan a inventé pour General Motors une Chevrolet conçue avec un châssis et un moteur uniques, mais selon le concept du changement de gamme à raison de trois nouveaux modèles de carrosserie, formes, couleurs et accessoires par an. En démodant rapidement les produits par la publicité, il pousse l'automobiliste à sans cesse abandonner son véhicule « démodé » au profit d'un modèle plus à la mode. 

- Le bas nylon : mis sur le marché par DuPont dans les années 1940, il était si résistant que les ventes s'effondrèrent, faute de besoin de renouvellement. En modifiant la formulation (notamment en réduisant le dosage de certains additifs destinés à protéger le polymère des UV), les bas se remirent à filer.

- Les imprimantes : certaines sont équipées d'une puce compteur, bloquant l'impression au-delà d'un nombre convenu de feuilles. Ces données figurent bien souvent dans le cahier des charges de l'imprimante. Certaines cartouches d'encre sont également équipées d'une puce comptant le nombre d'impressions, indiquant alors un faux niveau d'encre dans le logiciel d'impression, ce qui amène à jeter des cartouches contenant encore de l'encre

Très vite, le concept est repris par les designers. La mentalité est totalement différente. Ce n'est plus une doctrine économique qui est mise en avant mais un état d'esprit. Son principal défenseur, Brooks Stevens, dira dans les années 1950 : "inculquer à l'acheteur le désir de posséder quelque chose d'un peu plus récent, un peu meilleur et un peu plus tôt que ce qui est nécessaire". C'est donc à ce moment que la "mode" est apparue. En quelques années, les concepts de "capitalisme" et de "mode" sont rentrés dans les esprits et font désormais partie intégrante de notre manière de vivre.

Les différentes techniques sont les suivantes :

Défaut fonctionnel: la pièce endommagée d'un ensemble coûte plus chère à la réparation qu'à l'achat dudit ensemble (ex : couroi de transmission d'une machine à laver).

Obsolescence indirecte : lorsqu'une pièce d'un ensemble doit être réparée mais ne se trouve plus sur le marché (ex : batterie ou chargeur de certains GSM).

Obsolescence par notification: l'objet  signale à l'utilisateur qu'il est périmé (ex : certaines cartouches d'encre qui  sont parfois encore remplies).

Obsolescence par incompatibilité: l'objet n'est pas compatible avec les nouvelles versions (ex : programmes en informatique).

Obsolescence par péremption : concerne tout ce qui a une date de péremption. Ici, il faut bien distinguer "date limite de consommation" et "à consommer de préférence" car cela mène souvent à une mise à la poubelle prématurée. 

Obsolescence esthétique : l'objet est objectivement jugé inutilisable (ex : paires de chaussure).

Heureusement, très vite, certaines personnes ont tiré la sonnette d'alarme. En effet, dans un monde où les ressources sont limitées et où tous les déchets sont envoyés dans des pays du tiers-monde, ce genre de pratique n'a pas sa place. Que ce soient les énergies fossiles ou les mines de certains métaux,  rien n'est illimité.

Cette pratique est totalement inutile, malgré les avis de certains économistes.

Au jour d'aujourd'hui, un avantage peut être dégagé. Dans cette société qui est résolument consumériste, la fréquence d'achat de différents produits est tout à fait connue. Prenons un objet quelconque. Normalement, il a une durée de vie très incertaine qui varie en fonction de nombreux paramètres. Alors que si cet objet est soumis  à l'obsolescence programmée, sa durée de vie est tout à fait connue. Ceci réduit les risques économiques et facilite la planification des investissements industriels. C'est un des seuls avantages qui peut être mis en avant. Et encore, il s'agit d'un plus pour le fabricant et non pour l'utilisateur.

Cette technique engendre énormément de déchets. On peut parfois écouter à la radio ou voir à la télévision que les pays où sont envoyés nos déchets gèrent bien le problème, que la population a mis en place une structure permettant  de parfaitement réutilisé tout ce qui peut l'être. Effectivement, la population locale s'est "adaptée" mais avec tout ce que cela engendre. De par la manière de récupérer certains objets ou certains matériaux, le corps humain s'expose à divers danger (inhalation de fumées toxiques, brûlures, coupures, ...) sans parler du milieu naturel on ne peut plus polluer.

Cette pratique est de plus en plus mise à nu. Certaines lois apparaissent pour empêcher l'obsolescence programmée. Ceux qui l'utilisent encore perdent généralement des parts de marché à cause de la mauvaise image que cela donne. Citons à titre d'exemple les ipod de deuxième et troisième génération. Leur batterie ne tient que 18 mois. L'appareil ne s'allume donc plus et généralement, le service après vente d'Apple suggérait de remplacer l'appareil tout entier et ne vendait pas de batterie séparée. Elizabeth Pritzker intente alors un procès collectif contre Apple. Le procès ne sera pas terminé car ils trouvent une solution à l'amiable. Néanmoins,  Apple continue à appliquer ce genre de procédé et ce n'est pas pour autant que le consommateur stoppe ses achats dans ces magasins.

Il est donc utile de se poser les bonnes questions face à cette pratique. Pour ceux qui ne sont toujours pas convaincus de l'inutilité de cette pratique : est-il raisonnable, sur le long terme, de limiter volontairement la durée de vie d’un produit alors que nous avons les capacités techniques de le faire durer beaucoup plus longtemps, sachant que cela implique de :
- pousser le consommateur à redépenser de l’argent pour acquérir un bien qu’il a déjà ou similaire,
- générer massivement des déchets,
- consommer de manière tout aussi massive des ressources naturelles limitées pour la production de ces biens de remplacement?

Pour les amoureux du petit écran, le documentaire "Prêt à jeter" illustre très bien le concept  en exemplifiant de mille manières comment il est mis en place dans notre société.

Terminons par cette sage parole de Gandhi : "Le monde est assez grand pour satisfaire les besoins de tous, mais il sera toujours trop petit pour satisfaire l’avidité de quelques-uns."

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E
J'apprécie votre blog , je me permet donc de poser un lien vers le mien .. n'hésitez pas à le visiter. <br /> Cordialement
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